- sire
- Sire, m. penac. Est un terme d'honneur, préexcellent qu'on donne par antonomasie au Roy Tres-chrestien, sans adjection, et à autres inferieurs de l'estat de robbe courte, soient Chevaliers, Sire Chevalier, soient du commun estat, Sire Pierre, Sire Simon, Dominus. L'Italien dit Sere. (Nous disons par composition Messire pour mon Sire, comme si l'on disoit Men Sire à la façon des Picards) et Messere pour mi Sere, ce que aucunes nations d'Italie prononcent en un mot Misser. Le tout vient originellement de {{t=g}}hêrôs,{{/t}} vocable Grec, qui signifie un homme signalé en vaillance prouesse et excellence de vertu. Car tels personnages estoient communéement de tous appelez Sires, Messires, comme se voit en Amadis, et és anciens Romans, pour estre recognus pour leur grande vaillance à Seigneurs et maistres par le peuple bas. Et ainsi viendroit du mot Latin Heres, qui est provenu dudit mot Grec {{t=g}}hêrôs,{{/t}} et signifioit au premier, maistre et seigneur, comme dit Festus, disant encore aujourd'huy l'Alemand Her, par apocope, pour seigneur. Le Latin Herus en depend, combien qu'il n'ait signification si hautaine que ledit Grec, pour ne s'estendre, si n'est du serviteur au maistre. Le Sire François, et le Sere des Italiens qui plus tient et du Grec et du Latin, en viennent aussi estant presques ordinaire le changement de l'aspiration Grecque en la lettre S. quand le mot Grec passe en autre langage, comme de {{t=g}}hupnos{{/t}} Sonnus. sommeil, {{t=g}}hupo,{{/t}} Sub, sous. Aucuns veulent que ce mot Sire vienne de {{t=g}}kurios{{/t}} Grec aussi, ce que ne veux advoüer, ne debatre. Quoy que soit le François en commun usage, donne ce tiltre Sire, aux marchans, avec adjonction de leur nom ou surnom, et par antonomasie, sans adjonction, au Roy seulement. Vray est qu'il y a aucuns fiefs en France, aux seigneurs desquels est attribué le tiltre de Sire, avec adjonction du nom de leurdit fief, Comme, le sire de Ponts en Guyenne, qui est un tiltre signalé et octroyé à bien fort peu de fiefs en ce Royaume. On trouve aux anciens Romans François ce mot Sire avoir esté jadis plus commun, pour quelconque seigneur de place. Comme le Sire du païs, c'est à dire le Seigneur du païs. Quant à ce mot Messire, les François luy ont donné une grande prerogative, pour ne pouvoir estre usurpé entre gens laics, que par les seuls chevaliers de chevalerie Françoise, car le François n'usera de ce mot envers tous ceux que l'Espagnol et l'Italien appellent Cavallero, et Cavagliere, ains envers ceux sans plus, qui sont faits chevaliers par l'ordre, ou accollée, et autre cerimonie y appartenant, ou qui ont dignité de chevalerie en consequence de leurs degrez et estats, comme le Chancelier et autres et entre gens ecclesiastiques aux prestres: de sorte que le Messere ou Misser des Italiens est grandement inferieur en rang au Messire des François, voyez en outre Syre.
Thresor de la langue françoyse. Jean Nicot.